Elena Ferrante, L'Amie Prodigieuse




Vous reprendrez bien un peu d’Elena Ferrante ? 
Avec joie ! 💜


Après avoir dévoré les deux premiers tomes de la saga : « L’Amie Prodigieuse » et « Le Nouveau Nom », je me lance dans le 3 ème volume avec « Celle qui fuit et celle qui reste »
« L’Enfant perdue » m’attend, quant à lui, bien au chaud dans ma pile à lire.
Et autant vous annoncer la couleur : difficile de décrocher ! 
Elena Ferrante a su imposer un rythme puissant à sa saga, qui, loin de lasser, nous enchaîne aux livres comme à une série qui laisse des traces dans notre esprit tout au long de la journée. 



➼ La plume d’Elena Ferrante est tout simplement délicieuse ; A la fois limpide et recherchée, les mots de l’autrice sont aériens et sensibles, presque lyriques et l’histoire est un dénivelé permanent de ressentis éloquents. 
Lenù et Lila sont racontées avec un réalisme saisissant, sans anicroche ni fioritures. On comprend rapidement pourquoi la saga est devenue un phénomène et se place en tête des ventes dans de nombreux pays, notamment en France !
Au fil des pages, Lenù expose cette amitié passionnelle qu’elle entretient avec Lila depuis l’enfance. 
Depuis ce jour où leurs poupées sont tombées sont la cave du terrifiant Don Achille. Depuis ce jour, où , entrelaçant leurs doigts, elles sont allées réclamer ces mêmes poupées, poussées par le cran de l'intrépide Lila. 

Tantôt toxique, profonde et tumultueuse, cette amitié là est avant tout bouleversante et s’affranchie de tous les codes. On conçoit aisément sous la plume de Madame Ferrante, qu’une amitié peut se révéler au même titre qu’un amour, passionnelle. 
Sur fond de lutte des classes sociales, dans une Naples à double vitesse, la chaleur des étés napolitains est contée avec douceur en parallèle à la violence et à la pauvreté propres au quartier des deux amies. 

💜 Héritages familiaux déchus, jalousies, manipulation, romances avortées ou passions dévastatrices, l’atmosphère de l’Italie des années 1950 dépeint Lenù et Lila dans ce courant d’air chaud-froid qui les liera pour toujours. 
Lenù, posée, patiente, réfléchie, presque trop. Et Lila, dangereusement douée pour obtenir tout ce qu'elle désire, fougueuse, ardente. 



➫Pour autant, on ne peut considérer aucun des livres comme un page « turner », c’est bien trop élaboré !
On sent que l’autrice a mis énormément de sa personne dans cette quadrilogie. Le suspense reste à son comble : est-ce sa propre histoire qu’elle raconte là ? 
Son propre vécu ? Les ressentis sont traités avec justesse, presque méticuleusement, avec une désarmante authenticité. 
 On s’attache fortement aux personnages, aux différentes familles et à l’atmosphère générale de la Saga.

Si, au départ, j’ai eu quelques doutes concernant ma faculté à me situer par rapport aux différentes famille napolitaines (Caracci, Greco, Cerullo, etc.), ils se sont vite dissipés : une fois plongée dans ma lecture, tout était limpide. Petite exception je l’avoue, pour les prénoms d’hommes qui se ressemblaient parfois (Antonio, Alfonso) et me demandaient quelques secondes de réflexion pour ne pas me tromper dans le déroulé des évènements.



C'est l'histoire de deux existences. D'une amitié passionnelle. De l'école de la vie. De rancoeurs éphémères, de jalousies auxquelles on fait front, d'indélébiles moments où l'imagination s'enflamme, quand l'âme soeur amie vous fait vous sentir exister.  L'histoire d'un chemin à prendre, qui vous éloigne pour mieux vous rapprocher ensuite, l'histoire d'une Italie à bout de souffle, révoltée. De quartiers pauvres et de rêves de richesses. Pour comprendre que ce qui vous toujours échappé est là, sous vos yeux, attendant patiemment que vous en preniez la mesure.

En bref, une saga à mettre entre toutes les mains ! 😌




⥟. EXTRAITS .⥟

" J'éprouvai une double humiliation : j'eus honte de ne pas avoir réussi à être aussi forte qu'en primaire, et j'eus honte de la différence qu'il y avait entre la silhouette harmonieuse et bien habillée de l'enseignante, et son italien qui ressemblait un peu à celui de l'Illiade, et la silhouette toute tordue de ma mère, avec ses vieilles chaussures, ses cheveux ternes et son italien bourré de fautes dues au dialecte."

" En la lisant, je la voyais, je l'entendais. Cette voix sertie dans l'écriture me bouleversa et me ravit encore plus que lorsque nous discutions tête à tête : elle était totalement purifiée des scories du parler, de la confusion de l'oral, elle avait la clarté et la vivacité que j'imaginais être celles du discours quand on était assez chanceux pour être nés dans la tête de Zeus et non pas chez les Greco ou les Cerullo. J'eus honte des pages infantiles que je lui avais écrites, de mes exagérations, mes frivolités, ma joie feinte et ma douleur fabriquée. Qui sait ce que Lila avait pensé de moi!"

" C'est quoi, pour toi, "une ville sans amour" ?

- Une population qui ne connait pas le bonheur.

- Donne-moi un exemple

- L'Italie pendant le fascisme, l'Allemagne pendant le nazisme, nous tous, les êtres humains, dans le monde d'aujourd'hui."


" D'habitude, c'est moi qui étais belle, alors qu'elle était sèche comme un clou et qu'émanait d'elle une odeur sauvage; elle avait un visage long, étroit aux tempes et serré entre deux bandes de cheveux lisses et très noirs. Mais quand elle avait décidé de balayer Alfonso ou Enzo, son visage s'était illuminé comme celui d'une sainte guerrière. Le rouge lui était monté aux joues, signe que chaque parcelle de son corps s'était enflammée, à tel point que, pour la première fois, je m'étais dit: Lila est plus belle que moi. J'étais donc deuxième en tout. Et j'avais espéré que personne ne s'en rendrait jamais compte."

" Il y avait une part d'insoutenable dans les choses, les gens, les immeubles et les rues : il fallait tout réinventer comme dans un jeu pour que cela devienne supportable. L'essentiel, toutefois, c'était de savoir jouer, et elle et moi -personne d'autre - nous savions le faire."

" Depuis l’enfance, nous avions vu nos pères frapper nos mères. Nous avions grandi en pensant qu’un étranger ne devait même pas nous effleurer alors qu’un parent, un fiancé ou un mari pouvaient nous donner des claques quand ils le voulaient, par amour, pour nous éduquer ou nous rééduquer"

" J'ai compris seulement par la suite que si je sais être tranquillement malheureuse, c'est uniquement parce que je suis incapable de réactions violentes, je les crains et préfère rester immobile à couver ma rancœur. Mais pas Lila."

" Leur passion m'envahissait et me troublait. Je les aimais tous les deux et, de ce fait, je n'arrivais pas à m'aimer moi-même, à me sentir moi-même et à m'agripper à un besoin de vie à moi qui aurait la même force que le leur, sourd et aveugle."

" Je ne possédais pas cette puissance émotionnelle qui avait poussé Lila a tout faire pour profiter de cette journée et de cette nuit. Je demeurais en retrait, en attente. Alors qu’elle, elle s’emparait des choses, elle les voulait vraiment, se passionnait, jouait le tout pour le tout sans crainte des railleries, du mépris, des crachats et des coups."

" Je me rendis compte que j'étais arrivée ici pleine d'arrogance et réalisai que j'avais fait ce long trajet - en toute bonne fois, certes, et avec affection - surtout pour lui montrer ce qu'elle avait perdu et ce que j'avais gagné. Mais elle l'avait compris dès que j'avais surgi devant elle et à présent, risquant des ennuis avec ses collègues et des amendes, elle réagissait en m'expliquant qu'en réalité je n'avais rien gagné, que dans ce monde il n'y avait d'ailleurs rien à gagner, que sa vie était aussi débordante d'aventures surprenantes que la mienne, et que le temps ne faisait que passer, sans aucun sens : il était simplement agréable de se voir de temps en temps pour entendre la musique folle du cerveau de l'une faire écho à la musique folle du cerveau de l'autre."




Commentaires

  1. Merci de me donner le goût de la lecture avec vos belles publications sur votre blog ❤

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  2. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  3. Merci à vous deux 😘 ma mission est donc semi-accomplie : donner envie de les lire.. il n’y a plus qu’à , alors ! 😌☀️

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